jean fourastie

Le Dictionnaire de Sciences Economiques de Jean Romeuf, publié en 1956, fait appel à Fourastié et à Sauvy pour définir la population active (extraits). En 1956 le chômage en France était négligeable. Alfred Sauvy ne s’exprimerait plus de la même manière aujourd’hui.

Population active

Lorsque Fourastié écrit qu'il se produit un déplacement de la population active du primaire vers le tertiaire et précise, par exemple, il a fallu même que des individus changent de profession au cours de leur vie active, il est bien évident que pour lui est « actif » tout individu qui travaille ou peut travailler, l'inactivité n'étant qu'un accident. Sauvy, lui, considère que toute personne active est productive ; c'est même là une des conceptions à laquelle il semble très attaché ; aucun doute en l'occurrence puisqu'il va jusqu'à intituler un chapitre de sa Théorie générale de la population : Producteurs et inactifs, et précise sa pensée dès les premières lignes :

L'homme ne produit ni pendant les premières années de sa vie, ni pendant les dernières. Il peut y avoir aussi d'autres catégories d'inactifs, mais nous nous attacherons surtout aux enfants et aux vieillards et éviterons les complications inutiles en admettant que la population se compose d'une part, de jeunes et de vieux qui ne travaillent pas du tout et d'autre part, d'adultes qui travaillent tous de même façon... Disons donc que la société se divise en vieux et jeunes inactifs d'une part, adultes actifs de l'autre.

[…] On sait que la population active qui varie actuellement de 0 à 70 % de la population totale suivant les pays (et les définitions) se répartit, selon les critères maintenant adoptés, en trois secteurs (voir C. CLARK et J. FOURASTIÉ) et qui sont le primaire (activités à progrès technique moyen, agricoles par exemple), le secondaire (activités à progrès technique considérable, industries en général), le tertiaire (activités à progrès technique faible ou nul, services), la tendance générale actuelle étant un passage progressif d'un secteur à l'autre.

Chômage

 

Or, depuis 1930, certains pensent  constater une tendance assez générale à l'augmentation proportionnelle du chômage en toutes périodes. Cela tient à différents motifs matériels parmi lesquels nous devons indiquer l'amélioration des statistiques, les possibilités plus grandes d'inscription à une caisse de secours (c'est pour ces motifs et quelques autres que les chiffres ne sont nullement comparables entre eux et que nous disons bien qu'une tendance semble se manifester).

Un autre motif pourrait être l'accroissement du chômage technologique, qu'on pourrait plus valablement dénommer « chômage de non adaptation ». Fourastié explique ce qu'est ce chômage de la façon suivante :

En période de progrès technique, il est naturel que des travailleurs soient à tout moment acculés au chômage, du fait que le progrès technique, créant de nouvelles manières de produire, en périme d'autres. Une partie de la population engagée dans une ancienne méthode de production perd donc son emploi, c'est le cas des agriculteurs "traditionnels. ". En principe, les personnes qui sont chassées d'un emploi, périmé par certain progrès technique, doivent retrouver un autre emploi créé par un autre progrès technique, puisque le consommateur qui voit son niveau de vie augmenter voit parallèlement s'accroître ses besoins... Mais il n'en reste pas moins certain que la migration des travailleurs d'un secteur vers un autre secteur n'est pas toujours facile.

A. Sauvy qui a étudié à de nombreuses reprises les conditions du chômage technologique, notamment dans « le pouvoir et l'opinion », attire l'attention sur le fait qu'il résulte en grande partie de la non adaptation volontaire des individus, ce qui vient du caractère généralement misonéique de l'homme. Les groupes tendent alors à demander la protection des pouvoirs publics contre ce qui leur parait susceptible de léser leurs intérêts.