jean fourastie

Jean Fourastié ne raisonnait pas sur des idées, mais sur des faits. Il a dirigé de nombreux ouvrages sur l’évolution des prix. Jacqueline Fourastié a numérisé et transféré sur le site du Comité environ 1 400 séries de prix, la plupart provenant de ce travail et les a mises à jour depuis, autant que possible ; beaucoup de séries commencent en 1875.

En analysant les prix sur le long terme, on peut comprendre l’évolution des modes de vie entre le monde actuel et celui des siècles précédents. La comparaison peut se faire aisément en utilisant le «prix réel » qui est le quotient du prix courant par le salaire horaire total minimum. On suit  donc le temps qu’il faut pour produire un objet ou pour qu’un smicard gagne de quoi l’acheter.

 

Jean Fourastié affirmait que « Les relevés de prix soulevaient divers problèmes : celui des sources, celui de la nature des prix étudiés, celui fondamental de l’homogénéité des séries, celui enfin de leur degré de précision ». Ces phénomènes se sont amplifiés avec les approches commerciales actuelles qui accentuent les différences de prix pour le même bien ou service, selon les promotions et réductions. Certains produits sont rapidement obsolètes et même dis- paraissent, notamment les composants électroniques. Pour assurer la continuité de ces séries, nous nous sommes situés à la place de l’acheteur qui suivrait un critère de choix constant.

Ces séries permettent de constater que la plupart des « prix réels » baissent, surtout ceux des produits manufacturés, mais aussi ceux des produits agricoles. Les services devraient avoir un prix réel stable ; on observe cependant une baisse de certains « produits tertiaires ». La consommation, qui, au début de la période d’étude (1875), était presque exclusivement alimentaire, se diversifie : d’environ 80% du budget, la part de la nourriture est passée, lentement, à 16% aujourd’hui ; ce qui explique qu’à la fin du XIXe siècle, la part des produits manufacturés et des services dans la consommation moyenne était quasi-nulle, et que maintenant la part des pro- duits manufacturés soit de 26%, celle de l’énergie de 8,5%, et celle des services de 40%. Vers 1875, il fallait deux heures de travail pour acheter un kilogramme de pain ; le travailleur de base devait donc nourrir sa famille presque uniquement avec du pain. Petit à petit, le prix des denrées de base a diminué... Ce qui donne au consommateur d’aujourd’hui l’impression que la vie devient de plus en plus chère, c’est qu’il diversifie sa consommation, d’abord par une nourriture meilleure (légumes, fruits, et de plus en plus de viande), puis avec des produits manufacturés, et enfin des services… Le niveau de vie s’élève !

Ce graphique présente quelques exemples de prix réels (en salaires horaires) issus de la base de données. Depuis 1880, le prix réel du pain a été divisé par près de 10, avec des sauts dus aux passages de la miche au « gros pain », au « pain de fantaisie » puis à la « baguette » ; celui du beefsteak, bien que marqué par les guerres, a diminué fortement dans le long terme. La coupe de cheveux pour homme, série emblématique de Jean Fourastié, a un prix réel stable en tous temps, aux environs d’un salaire horaire (un peu davantage  récemment, avec le shampoing) : il faut toujours et partout le même temps pour couper les cheveux d’un homme. Le prix de la consultation médicale du généraliste, en principe tertiaire, a beaucoup baissé : le niveau de vie des médecins baisse par rapport à celui du smicard, et les cabinets sont plus modestes, avec moins de personnel et des techniques de diagnostic plus rapides.

Claude Gormand, Jacqueline Fourastié Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.