jean fourastie
Voici le dernier chapitre de Machinisme et Bien-Être, de Jean Fourastié.
CHAPITRE VII: L'HYGIÈNE, LA SANTÉ ET. LA DURÉE DE LA VIE HUMAINE
Il est difficile, semble-t-il, de récuser un témoignage essentiel du progrès humain : celui, de l'accroissement de la durée moyenne de la vie. Pour être civilisé, il faut d'abord vivre; pour penser, il faut d'abord exister.
L'homme aux quarante écus savait fort bien qu'au XVIIIe siècle, en France, un homme sur deux mourait avant sa vingtième année.
Admirables conditions pour promouvoir une civilisation intellectuelle! Pour accéder à l'Académie Française, il fallait d'abord triompher de la petite vérole.
L'allongement de la durée de la vie moyenne des hommes est le phénomène essentiel des temps modernes; à la fois conséquence du progrès technique et cause de l'accélération de ce progrès, cet allongement résume et synthétise l'amélioration du niveau de vie et du genre de vie.
Les causes de l'allongement de la vie moyenne
L'allongement de la durée moyenne de la vie humaine résulte en effet de nombreuses causes, toutes déterminées directement ou indirectement par le progrès des sciences.
L'une des plus évidentes des causes indirectes est l'amélioration du niveau de vie des masses populaires. La mortalité a toujours été beaucoup plus forte dans les classes pauvres que dans les classes aisées et riches. Mais, le fait que la mortalité se trouve à l'heure actuelle dans les classes les plus pauvres des nations progressistes très inférieure à ce qu'elle était vers 1750 dans les classes les plus riches, montre que le facteur proprement médical est prépondérant.
Le progrès scientifique a agi ici, comme en toute autre matière, par la découverte de déterminismes permettant à l'homme d'agir sur un phénomène docile à son action en vue de modifier, d'empêcher ou de provoquer un autre phénomène sur lequel il ne pouvait agir. Ici comme partout, la connaissance de déterminismes stables ou relativement stables dans le temps, entraîne la prévision et la prévision permet l'action.
D'où l'importance, plus grande encore en cette matière qu'en toute autre, de la rapidité de l'intervention, et par conséquent de la prévention et du dépistage des maladies. La physiologie décrit les déterminismes normaux; la pathologie les déterminismes morbides; la thérapeutique combat les évolutions morbides en s'efforçant de déclencher des déterminismes opposés prévalant sur les premiers. La thérapeutique, médicale et chirurgicale, est donc à la science biologique, ce que le progrès technique est à la science en général.
Les progrès de la biologie dépassent depuis quinze ans l'imagination commune : les sulfamides (1935), les antibiotiques (par exemple pénicilline, 1941, streptomycine, 1946, chloromycétine, 1948, auréomycine, 1949) ont réduit pratiquement toutes les maladies infectieuses (par ex. typhus, fièvre typhoïde, tuberculose, choléra, pneumonie, pleurésie). Les syphilis sont traitées par la pénicilline, avec pour adjuvants les médicaments antérieurs, le mercure, l'arsenic et le bismuth; elles sont définitivement guérissables depuis 1948. Il ne reste donc, parmi les très graves maladies courantes, que la lèpre, le cancer et la poliomyélite qui soient restés en-1950 dans leur état thérapeutique antérieur à 1935.
Nous avons isolé et nous savons extraire de glandes animales des hormones, dont la présence dans le corps humain sert de catalyseur pour l'accomplissement de certaines fonctions organiques (croissance physique, développement mental).
De plus, depuis 1930 nous savons fabriquer par synthèse toute une série de sécrétions glandulaires ayant des fonctions régulatrices ou assimilatrices (insuline, adrénaline, folliculine, cortisone); ces sécrétions permettent de suppléer à l'insuffisance de plusieurs glandes, essentielles à la vie quotidienne (pancréas, ovaires, capsules surrénales, etc.).
L'utilisation d'agents physiques tels que les corps radioactifs, les ondes électromagnétiques, les infra-sons, ouvrent de nouvelles voies.
La science de l'alimentation et des vitamines a de même permis de diminuer considérablement les maladies de carence (rachitisme, scorbut) et de remédier aux insuffisances de certains organes producteurs de sang, par exemple celles qui engendraient l'anémie pernicieuse.
La thérapeutique chirurgicale a de même accompli, depuis 1940, des progrès inconcevables au regard de l'évolution millénaire, soit par l'emploi des nouvelles techniques d'anesthésie et de surveillance du patient (ex. chirurgie du cœur et de l'estomac), soit par l'emploi de nouvelles techniques opératoires, souvent favorisées elles-mêmes par l'emploi des antibiotiques (ex. prostate). De plus, la neurochirurgie est en train de passer du stade de laboratoire à celui des réalisations sociales.
La prothèse enfin est en pleine révolution. Depuis les essais de la fin du XVIIIe siècle, époque à laquelle les premières « jambes de bois » conféraient aux invalides un caractère satanique[1], jusqu'aux membres artificiels de 1950, l'évolution est décisive. La vue est de mieux en mieux corrigée, l'ouïe améliorée. C'est dans la prothèse dentaire que se manifeste le mieux la tendance à une véritable incorporation de la matière inanimée au corps humain, à un positif redressement des infirmités ou des incorrections anatomiques.
L'effacement de ces laideurs, ou l'amélioration de ces insuffisances, conduit à la chirurgie esthétique, que l'on peut considérer comme englobant les soins de beauté (indéfrisables, massages et autres soins externes) et les traitements profonds (qui vont de la réduction des varices à la chirurgie proprement dite).
Toutes ces techniques diminuent la peine des infirmes et améliorent le sort de millions d'humains. La plupart d'entre elles contribuent pour leur part à l'allongement de la vie moyenne, et à l'accroissement de notre pouvoir d'action.
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L'allongement de la durée moyenne de la vie humaine depuis deux cents ans est l'un des phénomènes les moins contestables de l'évolution économique contemporaine. Comme le lecteur peut le comprendre maintenant, l'évolution dans le temps a engendré, en cette matière encore, une disparité dans l’espace, de sorte que l'on trouve, dans le monde actuel, des nations où la situation est restée voisine de celle de 1750, tandis que dans d'autres la durée moyenne de la vie a plus que doublé.
La mortalité au cours de la période traditionnelle
Les relevés valables relatifs à la mortalité d'une population nombreuse ne remontent pas au-delà du milieu du XVIIIe siècle. Nous n'avons donc d'indications sérieuses que pour l'extrême fin de la période traditionnelle.
En France, de 1750 à 1800, la mortalité annuelle moyenne (rapport du nombre total des décès d'une année au nombre total des vivants existant au milieu de cette année) parait avoir été de l'ordre de 30 à 35 %o. Au début des statistiques officielles, de 1806 à 1810; les taux enregistrés sont de 26 %o. Les statistiques suédoises et finlandaises, qui sont les plus anciennes statistiques démographiques du monde moderne, pour l'ensemble d'une nation, remontent à 1750 et accusent pour la deuxième moitié du XVIIIe siècle un taux moyen de l'ordre de 25 à 30 %o.
Ce que le lecteur a retenu de la première partie de cet ouvrage lui permettra de prévoir et de comprendre que les taux de mortalité de la période traditionnelle non seulement étaient très élevés par rapport aux taux actuels des pays progressistes (qui tombent depuis une vingtaine d'années au-dessous de 10 %o), mais encore étaient fort variables d'une année à l'autre. L'extrême instabilité du niveau de vie a pour conséquence une extrême instabilité de la mortalité.
Alors que le taux moyen-de mortalité est de l'ordre de 30 %o au cours des années 1750-1800, on enregistre en Suède 37,2 en 1772 et 52,6 en 1773; en Finlande, on note 41 en 1791, 60 en 1808, 59 en 1809, 78 en 1868. Ces chiffres donnent une idée de ce qu'ont pu être les mortalités d'épidémies ou de famines, telles que celle de 1709, en France même[2].
Ces taux excessifs de mortalité se retrouvent évidemment dans les nations du monde actuel qui sont encore restées fermées au progrès technique et n'ont bénéficié que d'un très faible accroissement du niveau de vie. En 1931-35; les statistiques de l'Inde et de Ceylan donnaient encore des valeurs de l'ordre de 25 %o. L'Égypte accusait 28 %o avant 1940. Quant à la Chine, aucune statistique d'ensemble n'est encore publiée, mais des enquêtes locales réalisées de 1929 à 1935 ont fait apparaître comme habituels les chiffres de 30 à 40 %o.
Ces taux de mortalité, les plus faciles à connaître à partir des registres de l'état civil, ne parlent à l'imagination que si l'on a compris qu'un taux de 33 %o correspond à une vie moyenne de 30 ans et à une vie probable de 10 à 20 ans[3].
L'évolution de la durée de la vie humaine depuis 1830
On peut résumer ainsi l'évolution enregistrée depuis 1830 dans les pays à grand progrès technique :
1) La vie moyenne et la vie probable se sont très fortement accrues, la vie probable plus encore que la vie moyenne;
2) Les variations et les disparités enregistrées d'une année à une autre se sont beaucoup atténuées;
3) Les classes pauvres ont gagné beaucoup plus que les classes aisées.
Ainsi les durées effectives de vie des hommes s'accroissent et s'égalisent à la fois. Ces faits apparaîtront clairement à la lecture des tableaux suivants.
Villermé, dont nous sommes heureux de citer une dernière fois le nom dans la conclusion de ce livre, parce qu'il nous paraît, avec Vauban et Lavoisier, être l'un des pionniers de cette science du niveau de vie, si nécessaire au bien du peuple, et cependant si négligée.
Villermé écrit en 1835 : « Pour trouver 100 hommes aptes au service militaire, il fallait 193 conscrits dans les classes aisées et jusqu'à 343 dans les classes pauvres[4] » Ce simple fait attire l'attention sur les considérables différences de conformation physique qu'entraînent les différences de niveau de vie que nous avons constatées dans la première partie de cet ouvrage.
Plus- précisément, et plus dramatiquement encore, Villermé constate, au cours d'une enquête très remarquable qu'il a conduite à Mulhouse et qui porte sur les décès de la période 1823-1834, que l'espérance de vie à la naissance atteignait 28 ans dans la classe riche, et (on ne peut l'écrire sans un sentiment de révolte !) un an et trois mois chez les « simples ouvriers des filatures ». On voudrait pouvoir dire que Villermé a commis une erreur. Il n'en est rien. Pour 100 naissances parmi ces ouvriers dont nous avons évoqué le niveau de vie, il y avait 30 décès dans les premiers 6 mois; 20 décès dans les 9 mois suivants. De ces 100 enfants, 27 seulement parvenaient à. l'âge de 10 ans, 17 à l'âge de 20 ans, 6 à l'âge de 40 ans et un seul atteignait 60 ans.
Il subsiste à l'heure actuelle une surmortalité des classes pauvres; elle a été mise en évidence par des enquêtes telles que celles de Huber et Hersch en, France, de Whitney aux Etats-Unis, du service officiel de statistique en Angleterre[5]. Mais les écarts entre les extrêmes observés depuis 1920 sont relativement faibles et se réduisent très rapidement. D'après les chiffres fournis par The Registrar General's Decennial Supplement qui représentent l'enquête la plus sérieuse dont nous disposions sur le sujet, la surmortalité entre les catégories extrêmes (les plus favorisées d'une part, les plus pauvres d'autre part), atteignait 48 % en 1921-23 et seulement 24 % en 1930-32. Nous sommes loin des taux de 500 à 1000 % qu'impliquent les statistiques de Villermé. Encore cet écart de 24 % se réfère-t-il à une situation vieille de vingt ans, et antérieure à la mise en vigueur des assurances sociales et à la découverte des antibiotiques.
Alors que, vers 1830, les classes les plus riches de la population française avaient une espérance de vie de l’ordre de 28 ans, les classes les plus pauvres ont maintenant une espérance de vie supérieure à 50 ans. L’espérance de vie moyenne de la population française atteint une valeur voisine de 60 ans.
Cependant, la France ne détient pas plus en cette matière qu’en ce qui concerne le niveau de vie, le record mondial. Les Pays-Bas, la Suède, la Norvège, le Danemark, la Suisse, l’Angleterre, les Etats-Unis, le Canada, et bien d’autres pays nous surpassent et bénéficient d’une espérance de vie qui oscille de 65 à 70 ans. À l’inverse, nous l’avons dit, on trouve encore dans le monde actuel des taux à peine plus élevés que ceux de la fin de la période traditionnelle (Inde 1921-30 : 26 ans).
La mortalité infantile
L'importance dans cette lutte contre la mort des premiers âges de la vie conduit à reproduire ici les admirables statistiques de la mortalité infantile. Il faut vraiment que l'humanité en soit elle-même aux premières années de sa vie pour n'avoir gardé conscience que depuis si peu d'années (un siècle et demi) du sort de ses petits-enfants. Ce n'est que depuis 1806 que la France connaît le nombre moyen de ses nouveau-nés qui meurent au cours de leur première année. Le tableau suivant retrace l'évolution, et permet la comparaison avec les Etats-Unis, comparaison qui autorise nos espoirs pour le proche avenir. Cinq pour cent des nouveau-nés meurent maintenant en France, au cours de leur première année, contre 3 % aux Etats-Unis, 2,5 % en Suède et en Nouvelle-Zélande, et 25 à 30 % au cours des siècles antérieurs au progrès technique.
M. Bourgeois-Pichat a calculé des taux rectifiés de mortalité infantile qui éliminent les décès pour défaut de conformation congénitale; ces taux rectifiés marquent, mieux encore que les taux classiques, les résultats de l'hygiène sociale.
N'auraient-ils à leur actif que ce seul palmarès, le progrès scientifique et le progrès technique devraient bénéficier de la reconnaissance des hommes de cœur.
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Les faits qui précèdent montrent les liens qui existent entre les phénomènes du niveau de vie et du genre de vie, étudiés dans le corps de cet ouvrage, et les phénomènes de mortalité. Plus généralement, le lecteur peut maintenant saisir l'interdépendance, le déterminisme, qui existent entre les faits suivants, en apparence indépendants : productivité du travail, durée du travail, élévation des âges scolaires, intensité de la production, pouvoir d'achat des masses ouvrières, évolution de la structure de la consommation et donc évolution nécessaire de la structure de la production; crises de surproduction relative et évolution divergente des prix; migrations de la population active, déséquilibres du commerce extérieur, etc. Le déterminisme est si net qu'il suffit de connaître pour un espace économique à faibles échanges extérieurs, l'une des caractéristiques du système pour connaître les autres, et résoudre ainsi des problèmes qui, il y a peu d'années encore, auraient paru aussi absurdes que celui qui consiste à déterminer la vitesse du vaisseau à l'aide de l'âge du capitaine, et de la hauteur du mât. En réalité, nous pouvons maintenant déduire par exemple du nombre d'hommes employés dans l'agriculture un ordre de grandeur du rapport du prix du pain au salaire horaire du manœuvre, un ordre de grandeur des âges scolaires, un ordre de grandeur de l'espérance de vie, etc. etc. Inversement, l'un de ces facteurs détermine l'ordre de grandeur des autres. La variable motrice de tout le système est le progrès technique, mesuré par la productivité du travail.
Plus spécialement, les liens qui existent entre la durée de la vie humaine, le niveau de vie et le genre de vie (encore une fois il ne s'agit pas de relations mathématiquement précises, mais de tendances), se traduisent par des faits tels que ceux-ci :
1) Quant au niveau de vie et quant à la durée de la vie moyenne, les nations de la terre présentaient une relative homogénéité avant 1800. Le progrès technique a rompu cette homogénéité. Il a déclenché une évolution dans le temps, dont la vitesse, profondément différente selon les nations, a engendré une disparité dans l'espace.
2) Dans celte évolution, la France occupe une situation moyenne; elle n'approche plus des records de progrès qu'elle pouvait prétendre à détenir étant donné le rôle qu'elle a joué et joue encore dans le domaine scientifique et philosophique.
3) L'accentuation des inégalités de nation à nation s'accompagne d'une réduction des inégalités enregistrées à l'intérieur, entre les membres des nations les plus évoluées. Les nations pauvres sont les nations à fortes rentes, donc à fortes inégalités sociales et à forte ouverture de l'éventail des salaires et de l'éventail des durées de vie moyennes.
4) L'évolution qui tend à l'allongement de la vie moyenne de l'homme, s'accompagne d'une régularisation des taux de mortalité selon les années et les mois de l'année. Dans la civilisation traditionnelle, les premiers âges de la vie donnent lieu à des hécatombes et la mortalité est fortement influencée, comme le niveau de vie, par les saisons et plus encore par les variations du climat (grands froids, grandes chaleurs, sécheresses, etc.). Dans les nations évoluées, au contraire, le niveau de vie, le genre de vie et la mortalité tendent à être de plus en plus indépendants des conditions naturelles, des saisons et des années.
Ainsi se vérifie, à l'échelle mondiale, cette tendance de l'être humain, autocinétique comme tous les êtres vivants, selon l'observation réellement géniale de M. Pierre Vendryès, à se rendre de plus en plus autonome par rapport au milieu extérieur[6].
Les conséquences de cet accroissement de l'autonomie humaine par rapport aux conditions qui lui sont imposées par le monde sensible sont évidemment innombrables; certaines apparaissent fâcheuses à de bons esprits... mais je ne puis penser, pour ma part, que l'homme n'accroît son autonomie que pour sacrifier le moteur même de sa recherche de l'autonomie : son individualité intellectuelle et morale.
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Il est possible que ces nouveaux taux de mortalité entraînent à la révision des morales traditionnelles de la conception. M. Alfred Sauvy a découvert et mis en évidence la notion essentielle d'optimum de population[7]. À chaque état de la technique de production dans une nation, correspond un nombre optimum de population. Lorsque la technique progresse, le nombre optimum croît parallèlement. Il n'en est pas moins certain que si plusieurs nations comme la France sont sans doute au-dessous de leur optimum, d'autres, comme la Chine, l'Inde et le Japon sont très certainement au-dessus. Ce fait risque de rendre très difficile et peut-être même impossible, sans aide extérieure, l'industrialisation des pays arriérés[8].
[1] Cf. L'invalide à la tête de bois; L'île au trésor de Stevenson, etc.
[2] . Parmi les mortalités les plus effrayantes qu'aient révélées les archives locales, on peut citer les taux de 300 %o à Copenhague en 1711, 450 à Dantzig en 1709, 500 Toulon en 1720 ; ces trois catastrophes sont dues, la peste.
[3] Vie moyenne et vie probable — On appelle vie moyenne ou espérance de vie d'un groupe d'hommes, le total du nombre des années vécues par les membres de ce groupe, divisé par le nombre des membres du groupe. On appelle vie probable (ou vie médiane) l'âge à partir duquel a cessé d'exister la moitié des membres du groupe. On conçoit que la vie moyenne puisse différer sensiblement de la vie probable. Par exemple, si nous considérons un groupe de deux hommes dont l'un est mort à l'âge de 1 an et l'autre à l'âge de 59 ans, la vie moyenne est de 30 ans et la vie probable de 1 an. Malgré leur absolue nécessité pour une étude sérieuse, nous ne pouvons préciser ici les rectifications nécessaires à la comparaison des taux de mortalité de deux groupes différents de population, d'âges divers. Le lecteur devra se reporter au Traité de démographie de M. Adolphe LANDRY (2° éd. Payot, 1949), ch. IV, par M. Sauvy, notamment p. 203 sq.
[4] Villermé, Tableau de l'état physique et moral... II, p. 245.
[5] Cf. l'étude de M. Jean DARIC, « Mortalité, profession et situation sociale », dans la revue Population, 1949, p, 671.
[6] Pierre Vendryès, Vie et Probabilité; L'acquisition de la science (Albin Michel éd., coll. Science d'Aujourd'hui).
[7] A. SAUVY, Richesse et Population.
[8] En effet, les études de la première partie de ce livre ne sont valables que pour les nations telles que la France et les nations occidentales, dont le développement démographique a été modéré. Les données démographiques ont été considérées par nous comme autonomes, quoique nous sachions bien qu'elles sont liées au niveau de vie et au genre de vie; mais elles sont liées aussi à bien d'autres faits sociaux et moraux. Il nous est en fait difficile d'étudier ce qu'eût été l'évolution économique en France si le développement démographique avait été différent de celui qui s'est trouvé réalisé en fait.